La ministre de la Justice Nicole Belloubet a désapprouvé dimanche que l'avocat général au second procès de Jacqueline Sauvage, condamnée pour le meurtre de son époux violent puis graciée, ait publié récemment une tribune au sujet de cette affaire.
Le 1er octobre, le magistrat Frédéric Chevallier, qui a soutenu l'accusation lors du procès en appel aux assises du Loir-et-Cher, a publié dans Le Monde une "Lettre à Jacqueline Sauvage" qu'il concluait ainsi: "Vous êtes devenue, sans doute malgré vous, le symbole inadapté d'un fait majeur de société".
En exécutant votre mari, vous nous avez privés d'un procès qui aurait peut-être permis d'inverser l'ordre des choses aujourd'hui établi. Vous l'avez condamné sans procès, vous n'en aviez pas le droit, écrivait le magistrat.
"La justice s'exerce pour éviter la vengeance des victimes et pour punir à leur place". "Je ne suis par certaine que ce soit son rôle", a déclaré dimanche sur LCI la garde des Sceaux."A partir du moment où on a été acteur dans un grand procès, on a dit ce qu'on avait à dire. Je ne suis pas certaine qu'il soit pertinent de s'exprimer à nouveau par la suite", a déclaré Nicole Belloubet. Ce texte avait été publié au moment de la diffusion sur TF1 d'un téléfilm dans lequel Jacqueline Sauvage était incarnée par Muriel Robin. A l'appel de la comédienne,
plus d'un millier de femmes se sont rassemblées samedi à Paris contre les violences conjugales, qui tuent une femme tous les trois jours. En réponse à la tribune du magistrat, les militantes féministes Karine Plassard et Suzy Rojman ont publié à leur tour un texte dans Le Monde, dans lequel elle estiment qu'il n'a "pas compris le ressort des violences conjugales". En première instance comme en appel, Jacqueline Sauvage a été condamnée aux assises à 10 ans de prison pour avoir tué son mari de trois balles dans le dos.Après quatre ans derrière les barreaux, alors âgée de 69 ans, elle est sortie de prison en décembre 2016 après la décision de François Hollande de lui accorder une grâce totale, après une vaste mobilisation en sa faveur. La décision de l'ancien président de la République avait soulevé de nombreuses critiques, notamment parmi les magistrats.